Saint Landelin - VIIe siècle

Avant le XIIe siècle, on a peu de certitudes au sujet de l'histoire de l'abbaye d'Aulne. Certains auteurs en viennent à dire que l'histoire d'Aulne se confond en grande partie avec celle de Lobbes : en effet, Aulne est restée placée sous l'autorité de Lobbes jusqu'en 961.

Selon la tradition, l'abbaye aurait été fondée par Landelin en  637.

Landelin était un noble, né en 613 à Vaux, près de Bapaume. Il fut baptisé par l’Évêque Aubert à son 10e anniversaire, ce qui était l'habitude à l'époque.

Il reçut les enseignements de St Aubert, mais en 630, se détache du droit chemin, s'associant à une bande de brigands, dont il devient le chef. Ils sévissaient le long de la Sambre.

En 632, à la mort d'un de ses compagnons de rapine, il a une vision et retourne auprès de son précepteur. En rédemption de ses péchés, il accomplit, à 3 reprises, le voyage à Rome.

Il est chargé par le Pape d'évangéliser nos régions. Il fonde ainsi l'abbaye de Lobbes, et par la suite, s'installe dans une ancienne villa (assemblage de quelques bâtiments, héritage de la conquête romaine) en bord de Sambre, dans une vallée à l'écart, boisée d'aulnes (d'où son nom).

C'est la fondation de l'abbaye d'Aulne. On est en 637.

Landelin fonde d'autres abbayes. Il meurt à Crespin le 15 juin 686.

Landelin imposa la Règle de St Colomban ou loi de Luxeuil, d'une sévérité difficile à suivre. Plus tard, la Règle de St Benoît, plus souple, servit de base à la vie monastique.

Les IXe et Xe siècles voient l'abbaye détruite lors des invasions des Normands/Vikings (881), des Hongrois (955).

En 889, Thuin et Aulne passent dans le domaine de l'Evêque de Liège.


Les cisterciens - XIIe et XIIIe siècles.

A partir de cette époque, l'histoire de l'abbaye devient plus précise.

En 1098, Robert de Molesme fonde l'abbaye de Cîteaux. C'est là que se développe l'ordre cistercien, une branche réformée des bénédictins.

En 1147, le prince-évêque de Liège offre Aulne à St Bernard (1090-1153), avec mission d'y instaurer l'ordre cistercien. Les premiers cisterciens, venant de Clairvaux, arrivent à Aulne en décembre 1147.

La donation par le prince-évêque de Liège est confirmée par une charte en 1158.

Le village d'Aulne disparaît en 1205 : Hugues de Pierpont, prince-évêque de Liège lui aussi, par décret, ordonne aux habitants de céder tous leurs biens aux moines, sous peine d'excommunication.

L’église abbatiale est construite par les abbés Gilles de Beaumont (1214-1224) et Baudouin de Châtelet (12214-1247).


Les XVIe et XVIIIe siècles

En 1507, des troupes françaises détruisent une partie de l'abbatiale, mais elle sera reconstruite dix ans plus tard par l'Abbé Bosman. On consacre l'église en 1525.

L'abbé Edmont Jouvet (1622-1655) réorganise la bibliothèque et crée un collège à Louvain.

L'abbé Barthélémy Louant (1728-1753) reconstruit en grande partie l'abbaye. Le style classique est choisi pour cette reconstruction : c'était la mode de l'époque...

L'église est modernisée par l'abbé Maur Mélotte (1753-1763).

L'abbaye prend l'apparence que l'on peut imaginer aujourd'hui, grâce aux dépenses fastueuses de l'abbé Scrippe (1765-1785) : il commande un nouveau palais abbatial, la carrosserie, le quartier de l'économe, une salle de réception, la ferme abbatiale, la grille d'entrée et la chapelle Sainte-Marguerite.

En 1790, Dom Norbert Herset est nommé Père Abbé d'Aulne : il sera le dernier...


L'!ncendie

En 1794, dans le tumulte de la révolution française, Saint-Just, de sombre mémoire et le général Charbonnier saccagent et pillent la région.

En mai 1794 ils détruisent en grande partie l'abbaye, avec l'aide des villageois.

Le monastère comptait encore, à cette époque, 52 moines et 3 convers.

Les 13 et 14 mai, les nombreux livres et manuscrits de la bibliothèque sont brûlés dans ce qui était le réfectoire du maigre.

Les moines se sont tous enfuis en emportant le maximum de leurs biens. En route, ils sont assaillis et pillés.

Ils restent un peu à La Louvière, dans leurs propriétés. Quand ils en partent, ils voient au loin les fumées des incendies d'Aulne et de Lobbes.

Dom Herset et ses confrères se réfugient en Allemagne.

Six mois après l'incendie, les moines décident de rentrer au pays. Dom Herset reste en exil. A leur arrivée, ils découvrent ruines et désolations et aucun bâtiment pour s'abriter.

Ils s'installent à Baudribus, qui a servi de quartier général aux français : le château est aussi dans un état lamentable mais encore habitable.

En mars 1795, des premiers travaux sont entrepris pour au moins consolider ce qui reste des bâtiments et aménager des structures habitables.

Au début du mois d'août, Dom Herset revient à Aulne. Il entreprend les démarches pour récupérer la propriété de l'enclos, ce qui lui fut accordé en septembre 1796.

Les quelques moines réparent au mieux les bâtiments de manière plus durable.


Perte de tout espoir.

En septembre 1796, la République supprime les ordres religieux. Tout espoir de reprendre la vie régulière est perdu. A quoi bon restaurer encore. Ils abandonnent les travaux le mois suivant.

Des fonctionnaires de l'état intiment aux religieux de quitter leur maison sous 20 jours. Ils reçoivent des bons de retraite en échange. La République confisque tous les biens qu'elle peut, espérant que les anciens propriétaires rachètent leur ancien avoir; le but est de faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'état.

Dom Herset regroupe les bons de ses confrères, ce qui lui (leur) permet de racheter des biens que la République avait confisqués.

Les bâtiments de l'enclos et des fermes ont été rachetés pour une somme de un million de francs (de l'époque et il est assez difficile d'évaluer un montant actuel).

Il fut maintes fois nécessaire de vendre les éléments de construction de l'abbaye (bois, fer, pierre,...) pour subvenir aux besoins de la communauté.

N'ayant pas prêté serment à la République, Dom Herset est rechercé et doit, encore une fois, s'exiler.

C'est pendant cette période (1799) qu'il rédige le "Chronicon Alnense", source insatiable d'informations sur la période cistercienne de l'abbaye.


Le testament et la fin d'Aulne.

En septembre 1802, Dom Norbert rentre enfin à Aulne.

Sentant ses forces décliner et de plus en plus persuadé que le monastère ne serait jamais rétabli, Dom Herset rédige son testament le 10 avril 1806. Le testament est validé par Napoléon quelques semaines plus tard, le 24 juin 1808, à Bayonne.

Peu de temps après, il voyage à nouveau vers le Béguinage de Saint-Tond et s'y éteint le 15 septembre 1806. La communauté d'Aulne n'existe plus.

Par son testament, il léguait tous ses biens (dont l'abbaye) aux moines survivants, à la condition qu'à la mort du dernier (Dom Norbert Decouve - 21/5/1854), un hospice soit organisé pour les pauvres et les nécessiteux natifs et domiciliés à Gozée.

Il ne fut pas aisé de trouver un directeur : en 1856, l'abbé Buisseret prend en mains l'administration de l'hospice. Il est officiellement installé dans ses fonctions : l'hospice est ouvert. En juin arrivent les sœurs hospitalières de Mons.

Les ruines de l'abbaye ont souvent servi de "carrière" pour les constructions environnantes : l'écluse, le tunnel de la voie de chemin de fer, ...

Comme dit plus haut, des matériaux furent vendus. Les voisins ne se privèrent pas non plus à y faire leur marché.


L'hospice Herset- Restauration

Il a donc commencé à accueillir les pensionnaires depuis 1856. Pour des raisons de sécurité, le home dut fermer ses portes en 2014.

Plusieurs abbés se sont succédés à l'administration de l'hospice. Certains d'entre eux (Defresne, Soudan, Wallez, Wiart) eurent à coeur la préservation du site, avec plus ou moins de bonheur.

En 1869, débute la construction de l'église Saint-Joseph, qui sera bénie en 1873.

En 1899, jusqu'en 1908, différents travaux sont réalisés. L'architecte  Louis Cloquet consolide et restaure certaines parties des ruines. Il reconstitue la verrière du transept sud.

De nombreuses initiatives ont été entreprises pour garder le site dans un état accueillant mais, jusqu'à présent, aucune n'aboutit à une solution définitive.

Affaire à suivre...